RICHIE HAWTIN 1/06/2007
Il est une figure mythique de la musique électronique. Au cours de ses nombreuses années de carrière, il s’est forgé une image d’artiste à part. Richie Hawtin serait donc l’intellectuel de la musique électronique en somme. Parallèlement à ses projets expérimentaux sous le nom de Plastikman, il produit de nombreux tubes qui déchainent les dancefloors sous le nom de Richie Hawtin. Le leitmotiv de ce Dj pas comme les autres ? La recherche constante de l’innovation musicale par une exploration curieuse de toutes les possibilités qu’offrent les nouvelles technologies. Intéressant, non ?
Tu es aujourd’hui un des piliers de la musique électronique mais tu as un statut un peu particulier : celui d’un artiste atypique. J’ai commencé en 1989, je fais donc partie des pionniers et je peux dire que j’ai fait beaucoup de styles différents tout en restant moi-même. C’est peut-être pour cela que j’ai l’image d’un artiste atypique. Si j’ose prendre des chemins inexplorés, c’est parce qu’avant tout je veux faire quelque chose de pertinent. Il s’agit d’un défi pour moi mais c’est aussi un challenge pour mon public, pour qu’il découvre sans cesse des nouveautés.
Tu as toujours considéré la techno comme une véritable discipline artistique... La musique est un art comme les autres et ce n’est pas la technologie qui va destituer ce statut. Depuis toujours les hommes utilisent des objets pour leurs créations artistiques. Aujourd’hui il y a Photoshop que tous les grands photographes utilisent et pourtant ça ne viendrait à l’esprit de personne de remettre en cause la créativité de l’artiste. La technologie a changé la musique en tant qu’art dans la mesure où elle met à l’épreuve notre créativité. La vraie créativité d’un Dj relève de la façon dont il va utiliser cette technologie pour créer sa musique. Tout le challenge est de trouver un moyen d’exploiter les nouvelles technologies à des fins artistiques. C’est une forme de combat entre l’homme et la machine !
Pour chacun de tes albums, il y a un concept fort que tu développes... Beaucoup de Dj’s se contentent de faire de la musique fonctionnelle, c’est-à-dire uniquement calibrée pour le dancefloor. Pour eux la musique n’a qu’une fonction : être écoutée pour danser dessus. J’essaye de donner à tous mes albums une autre dimension que cet aspect fonctionnel. Ce qui m’intéresse c’est que ma musique soit écoutée pour intéresser les gens et les faire réfléchir. Je veux explorer la musique pour y trouver autre chose, une dimension plus profonde.
Ta créativité est-donc guidée par les avancées technologiques ? On peut dire ça comme ça. Mais il n’y a pas que ma créativité qui dépende des avancées technologiques, il y a aussi ma propre perception des choses en général. D’ailleurs j’étais un mordu d’informatique avant de me lancer dans la musique. Quand j’ai vu que c’était possible d’allier l’informatique à mon autre passion qui était la musique, j’ai foncé. S’il n’y avait pas de recherche et d’innovation, la création musicale serait insipide, vide de sens.
Sur “DE9, Transition”, ton travail portait sur ces moments de transition entre deux morceaux. C’est un retour à l’essence même du mix ? En réalité, ça remonte même beaucoup plus loin que ça ! Avec cet album, j’ai voulu revenir aux sensations qu’éprouvaient les tout premiers Dj’s, dans les années 60-70. A l’époque, le mix se résumait à enchainer deux disques d’une façon qui soit la plus “propre” possible. Je voulais retourner à l’origine même du mix, quand les Dj’s s’intéressaient uniquement à la transition technique et voir comment on s’était affranchi de cette difficulté avec toute la nouvelle technologie dont les Dj’s disposent aujourd’hui. Le but était de voir ce qu’on avait gagné avec les progrès techniques mais aussi de voir ce qu’on avait perdu depuis.
On a le sentiment qu’il y a Plastikman pour le côté expérimental et Richie Hawtin pour les tubes du dancefloor ? C’est à peu près ça. Mais je tiens tout de même à préciser qu’avec Plastikman, il y a des morceaux très dansants sur le dancefloor. Je ne fais pas que de l’expérimental. Mais j’avoue que j’ai peut être un peu moins de liberté créatrice avec mes productions sous le nom de Richie Hawtin. J’ai effectivement une autre facette musicale, un peu plus orientée “club” avec ces productions.
Tu te réjouis des progrès techniques qui ont déjà révolutionné le Djing et de ceux qui sont encore à venir ? Je suis constamment à la recherche du progrès surtout en ce qui concerne la technologie mais je pense qu’il est très important de rester conscient du danger que cela représente. La plupart du temps, les avancées technologiques sont un progrès. Mais il faut être conscient que ce n’est pas systématique et l’histoire de l’Homme nous l’a déjà prouvé. Lorsqu’on passe son temps à regarder en avant, pour savoir où on va, pour aller toujours plus loin, on risque d’oublier d’où l’on vient et ce que l’on est. Le futur est passionnant mais il faut veiller à bien rester ancré dans le présent se souvenant de notre passé.
Tu as bien quelques productions à sortir prochainement... Effectivement, il y a la compilation de mon label Minus qui est sortie en mai pour montrer ce qu’on fait de mieux depuis deux ans sur le label. Et puis il y a mon nouvel album Plastikman, sur lequel je travaille actuellement qui sortira un jour. Quand ? Je ne peux pas vous le dire.
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www.myspace.com/plasstikmaan